Répondre aux besoins croissants de connectivité des utilisateurs tout en prenant le chemin d’une exploitation responsable. C’est le défi que doivent relever au quotidien les dirigeants IT des grandes organisations. Comment y parvenir ? Directeur des partenariats stratégiques Europe d’Alcatel-Lucent Enterprise, Youb Saïm livre ses conseils, en insistant notamment sur l’importance de la sobriété des usages.

 

Peut-on faire mieux avec moins ? Non, il ne s’agit pas du sujet de la dernière session de l’épreuve de Philosophie du BAC, mais plutôt de la question posée à un panel d’experts de l’IT lors d’une conférence organisée, le 22 novembre dernier, dans le cadre du GreenTech Forum 2023. Parmi eux : Youb Saïm, Directeur des partenariats stratégiques Europe d’Alcatel-Lucent Enterprise. Alors, comment concilier (r)évolution des architectures réseaux et sobriété numérique ? Fort de ses 30 années d’expérience et de sa parfaite connaissance des secteurs des villes et bâtiments intelligents et de la défense, l’ingénieur est formel : la bonne stratégie passe d’abord par la frugalité et ensuite seulement par l’innovation. « L’univers du numérique a un impact non négligeable sur l’environnement. Selon un rapport de l’ADEME et de ARCEP, notre secteur représente 2,5 % de l’empreinte carbone nationale. À elle seule, la fabrication des appareils et terminaux contribue à 65 à 92% de ce total. C’est considérable ! Les évolutions technologiques rendent les réseaux plus énergivores. Bien sûr, les industriels doivent s’engager à commercialiser des équipements moins consommateurs d’énergie et à moindre impact sur l’environnement. Mais, avant toute chose, nous devons réduire l’usage et le renouvellement d’équipements, en particulier dans les architectures réseaux ».

 

Surveiller la performance environnementale des réseaux

Cette philosophie de sobriété doit s’appliquer à chaque étape d’un projet de création ou de renouvellement d’une infrastructure réseau. On pense d’abord à la phase de conception avec ce juste équilibre à trouver entre la nécessaire réponse aux besoins des équipes et la quantité d’équipements déployés. Il en va ensuite de la surveillance de l’architecture lors de son exploitation. Objectif ? Détecter d’éventuels usages superflus et, plus généralement, optimiser la consommation d’énergie du réseau au fil du temps. « Les équipes IT doivent se doter d’outils permettant de mesurer l’impact énergétique des réseaux en phase opérationnelle. Malheureusement, trop peu de solutions de ce type semblent aujourd’hui disponibles sur le marché. C’est d’autant plus regrettable que l’efficacité énergétique n’est pas le seul critère qui mérite d’être surveillé. Nous avons également besoin d’indicateurs de mesure environnementale au sens large, pour évaluer les impacts des réseaux sur l’ensemble de leur cycle de vie ». En attendant l’émergence de ce type d’outils, la mise en place d’une stratégie de sobriété numérique au sein d’une organisation doit se traduire par des choix ambitieux de conception et d’exploitation. Elle impose donc un dialogue permanent et constructif entre les responsables IT et RSE pour aligner les objectifs et mesurer les résultats. Il s’agit notamment d’éviter l’effet rebond dans lequel l’optimisation et l’amélioration des performances technologiques sont annihilées par l’intensification des usages, impliquant une augmentation du volume de données. Un mécanisme auto-alimenté qui nourrit l’évolution du système numérique et que la sobriété numérique interroge. Pour fabriquer un Système d’Information durable, il faut soit renoncer soit optimiser.

 

Campus éco-responsable : 80 % d’usage de cuivre en moins

La preuve par l’exemple. Il y a quelques mois, les équipes Alcatel-Lucent Enterprise ont travaillé sur la rénovation du campus d’un grand établissement universitaire français. 60 000 mètres carrés de bâtiments, 2 000 étudiants, 250 chercheurs, et une nouvelle infrastructure réseau devant s’inscrire dans la vision éco-responsable du site. « Pour ce projet, l’ambition de sobriété numérique a été intégrée dès les premières discussions portant sur la construction du réseau. Avec le client final, nous avons essayé d’envisager toutes les options disponibles pour réduire l’impact environnemental de l’architecture numérique, témoigne Youb Saïm. Après mûre réflexion, nous avons donc opté pour l’usage de la fibre optique et pour la conception d’un réseau en anneau (ndlr : forme dans laquelle les ordinateurs sont reliés entre eux au sein d’une boucle fermée). Cette approche a conduit à une réduction de 80 % de l’utilisation du cuivre. Elle a également engendré d’autres bénéfices environnementaux notables tels que des économies d’énergie, une diminution de l’espace mobilisé par l’infrastructure ou une réduction de la durée et de l’ampleur des travaux de déploiement. ».

 

Faire converger les enjeux de sécurité et de sobriété

Un cas d’école renouvelable à l’avenir ? L’essor du numérique responsable en dépend. Cet impératif de sobriété devra néanmoins cohabiter avec l’autre grande priorité du moment pour les responsables IT : la cybersécurité. Un enjeu symbolisé par la diffusion croissante du modèle Zero Trust Network Access (ZTNA). Selon celui-ci, l’accès aux applications internes pour les utilisateurs à distance repose sur un principe de “besoin de savoir”. Autrement dit : il vise à dissocier l’accès au réseau de l’accès aux applications. « L’impératif de sécurité et celui de sobriété ne doivent pas être vus comme antagonistes. Au contraire, les considérations de sobriété numérique doivent être intégrées dans les pratiques de sécurité. Les deux aspects nécessitent une réflexion commune. Par exemple, la refonte d’une architecture réseau obsolète peut être une occasion idéale pour une remise à niveau sur ces deux enjeux simultanément ». Peut-on faire mieux, plus sûr et avec moins ? La thématique de la prochaine conférence événement du GreenTech Forum 2024 – et/ou de la prochaine session du BAC – est déjà toute trouvée.

 

 

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