L’évolution du travail – Episode 7

L’aménagement de l’espace de travail est directement lié à l’évolution des modes de travail. Dans les années 1990, il est le domaine réservé du chef d’entreprise, construit autour de son bureau individuel. Vingt ans plus tard, l’environnement de travail est aménagé collectivement et se transforme pour répondre à un enjeu d’adaptation permanente. Demain, les collaborateurs eux-mêmes seront à la manœuvre pour concevoir leur espace, en cherchant à lui attribuer les valeurs de leur entreprise, à lui donner du sens avec un impact positif sur le territoire où il est implanté. Une tendance résolument RSE [1], qui pourrait transformer la mission des directeurs immobiliers. Témoignage de Marc Simon, Administrateur Délégué de l’Association des Directeurs Immobiliers (ADI) et membre de la SBA.

En préambule, pouvez-vous présenter l’ADI en quelques mots ?

Marc Simon – L’ADI est une association qui existe depuis près de 25 ans. Elle rassemble 400 directeurs et responsables immobiliers en France. Elle a pour vocation d’accompagner les directeurs immobiliers au quotidien, pour les aider à exercer leur mission de manière efficace et influente, pour défendre les intérêts de leur entreprise, et pour promouvoir leur métier auprès des décideurs économiques et publics. Concrètement, nous nous réunissons pour aborder des pistes de réflexions sur les problématiques communes liées à l’immobilier d’exploitation, aux usages et aux mobilités. Nous produisons aussi des ouvrages, comme par exemple notre dernier livret sur le Décret Tertiaire.

Personnellement en tant qu’Administrateur, je voudrais apporter mon expérience à l’international et aider l’ADI à investir ce champ et s’inspirer de bonnes pratiques à l’étranger. Dans ce cadre, je pourrais mettre à profit ce que je retire de la présidence de CoreNet Global [2] que j’ai assurée ces dernières années.

Comment imaginez-vous l’avenir de l’immeuble de bureaux ?

MS – Demain, je doute que les bâtiments tertiaires abritent une seule entreprise. Ce sera la fin des immeubles monolocataires. Bien sûr, il y en aura probablement encore, mais ce ne sera plus la norme. Ma conviction est que nous allons de plus en plus vers une économie de partage. Ainsi, les bâtiments verront leur plage d’utilisation s’étendre. Ils ne seront plus occupés uniquement de 7 h du matin à 21 h le soir, mais 24 h sur 24 et 7 jours sur 7. En ouvrant leurs portes à une plus large audience, ils seront multiusages et partageront leurs espaces avec des partenaires, des clients, des startups, des étudiants, des habitants… Les immeubles de bureaux répondront ainsi mieux aux besoins des territoires dans lesquels ils sont implantés.

Par ailleurs, ma vision de demain se traduit par des entreprises de moins en moins nombreuses à posséder un site dédié. Elles devront mettre en place des mesures permettant à leurs salariés de s’organiser avec plus de souplesse quant à leur lieu de travail. Ils pourraient, par exemple, détenir une carte universelle, une carte « Navigo » de l’immobilier, qui leur permettrait de disposer de différentes solutions de bureaux.

Ajoutons que les environnements de travail seront encore plus numériques qu’aujourd’hui. Véritables EAAS (des Espaces As A Service), ils sauront s’adapter aux besoins et aux usages des occupants. De surcroît, les collaborateurs seront particulièrement attentifs aux valeurs de leur entreprise et à la façon dont elles se traduisent dans leurs bâtiments, en matière de développement durable et de qualité de vie au travail. Je pense que des nouveaux labels vont se déployer, devançant les certifications BREEAM, LEED ou HQE, représentatives de la qualité du bâti, ou WELL sur l’aspect utilisateur. Ces labels d’un nouveau genre devront intégrer une approche plus large de la RSE (et prendre en compte l’émergence du télétravail avec les évolutions juridiques qu’il entraîne).

Enfin, ces différentes évolutions du bâtiment tertiaire auront des retombées importantes dans le futur. Évidemment, les entreprises mèneront une réflexion sur l’exploitation de leurs surfaces, avec des collaborateurs plus mobiles et acteurs de leurs espaces de travail. Conséquence : les modes de management vont évoluer, vers plus de confiance dans la relation manager-collaborateur, et un présentiel plus au service de la communauté.

Quel effet ces évolutions auront-elles sur le métier de directeur immobilier ?

MS – Les directeurs immobiliers sont, par nature, des professionnels de l’entreprise, avec une bonne connaissance « business », et qui embrassent un panel très large de missions. Celles-ci vont bien au-delà de la simple approche financière des actifs immobiliers. La composition des directions immobilières démontre la position transversale de l’expertise de l’immobilier et leur place au coeur de l’évolution des immeubles de bureaux. Nous avons l’habitude de dire à l’ADI, que le directeur immobilier est un coordinateur. Il est en effet, comme le révèle une dernière étude que l’association a réalisée, un acteur central de la stratégie des entreprises. Ces missions investissent tout à la fois des problématiques RH et sociales, financières, digitales, juridiques, organisationnelles et de plus en plus territoriales. Le bâtiment va donc jouer un rôle toujours plus important, il va devenir intelligent et communiquer avec de nombreux acteurs au service du territoire probablement. C’est en cela notamment que le standard pour le bâtiment connecté et intelligent R2S, développé par la SBA, est intéressant. Dans cette perspective, la SBA et l’ADI se sont déjà rapprochées pour dresser des pistes d’action communes. De cette collaboration, nous renforcerons la place de l’immobilier, au sein des entreprises et des territoires et au-delà, comme une ressource créatrice de valeur et porteuse de progrès. Nous en sommes convaincus à l’ADI !

[1] Responsabilité Sociale des Entreprises
[2] Corenet Global est une organisation à but non lucratif basée à Atlanta (États-Unis), représentant 10 000 cadres de l’immobilier du monde entier.

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