L’évolution du travail – Episode 2


Avec un foncier rare dans les villes et des loyers qui explosent, il est de plus en plus difficile de trouver à se loger près de son travail en agglomération, surtout si l’on ne bénéficie pas d’un CDI, alors que le contrat tend à disparaître avec l’évolution du travail. Les conséquences sont celles que l’on connaît tous : temps perdu dans les déplacements, émissions de CO2 dans les embouteillages, fatigue, énervement et qualité de vie en berne. François Ferry, Directeur de la société Pollen Concepts présente sa solution – des maisons écologiques, connectées, modulaires et mobiles – rendue possible grâce à la loi ALUR. Explications.

 

Face à la pénurie de logements et la hausse des prix des habitats dans les grandes agglomérations, les salariés s’éloignent de plus en plus des villes. « Aux Pays-Bas, les trentenaires citadins qui gagnaient trop pour les appartements sociaux mais pas assez pour accéder à la propriété allaient même jusqu’à quitter leur pays » rapporte François Ferry. Face à cette situation alarmante, la ville de Rotterdam a réagi en autorisant l’installation de maisons en bois préfabriquées le long de ses canaux. Ces logements de 45 m² novateurs ont la particularité d’être mobiles, écologiques et connectés. D’autres pays ont choisi la même voie, à l’image de la Suède qui autorise les habitants des grandes villes, comme Stockholm, à construire des petites maisons dans les jardins sans demander de permis de construire.

Quelle solution de logement en ville en France ?

La France avait pris une autre option pour endiguer la hausse des prix, celle de plafonner les loyers dans les grandes agglomérations. « Malgré cela, il n’y a pas de place en ville pour les jeunes qui démarrent, dans une société où la précarité, choisie ou subie, s’installe, avec l’essor du travail indépendant, regrette François Ferry. C’est l’expérience vécue par mon fils quand il a commencé sa vie professionnelle. » Une situation qui explique le phénomène grandissant de la colocation, pour profiter d’espaces de vie plus grands et partagés et, souvent, d’un accès sur l’extérieur, terrasse ou jardin. Mais ce choix est plus souvent subi que désiré et concerne toutes les tranches d’âge, dont des seniors.

Dissocier le foncier de l’immobilier, c’est possible ?

François Ferry a décidé d’offrir à ces nouveaux précaires un autre choix, reproduisant l’esprit d’un village de micro-maisons et services. « J’ai toujours milité pour les bâtiments passifs et le bas carbone, » explique-t-il. Sa décision a été renforcée quand il a réalisé une enquête auprès de citadins sans CDI âgés de 25 à 40 ans, qui montre qu’ils ne se projettent pas à plus de 5 ans et qu’ils sont mobiles. Ainsi est née sa société Pollen Concepts. « Pour qu’ils puissent se payer tout le confort possible à prix raisonnable, j’ai eu l’idée de proposer de dissocier le foncier du bâti. Et c’est ce qui fait toute la différence. Alors qu’un studio de 20 m² dans Paris se négocie à 250 000 euros, une maison de 45 m² écologique et équipée de domotique coûte environ 80 000 euros. » Mieux : ces modules fabriqués selon le mode de construction Hors-Site peuvent aussi servir à abriter des services pour les citadins, comme des micro-crèches, des tiers-lieux ou des petites résidences toutes équipées pour du maintien à domicile. « Je propose par exemple à des bailleurs d’utiliser une terrasse d’immeuble pour monter une crèche en échange de la rénovation énergétique du bâtiment ou l’installation d’un ascenseur… Ainsi tout le monde est gagnant. »

Quel apport pour les collectivités ?

Aussi séduisantes soient-elles, les maisons mobiles de Pollen Concepts n’ont pas forcément reçu un accueil enthousiaste de la part du marché, qui associe encore le foncier et l’immobilier et qui imagine qu’il serait difficile de fabriquer des logements de qualité sans recours au béton. En outre, la loi interdirait d’y loger à l’année. « Rien de plus faux ! s’insurge François Ferry. Nous avons consulté des juristes urbanistes pour nous en assurer. Et regardez les péniches sur la Seine à Paris : elles n’ont pas de fondations, leur design intérieur fait rêver et elles abritent leurs propriétaires sur le long terme. Ceux-ci louent l’emplacement et les connections aux réseaux. J’aime à dire que nous réalisons des péniches sans eau. »

Les maisons mobiles apportent de nombreux avantages pour les collectivités : le foncier n’est pas immobilisé, les bâtiments sont construits dans un temps record (bien plus court que la durée d’un mandat municipal de 6 ans !) et cela permet d’occuper d’anciennes friches industrielles. On doit à la loi ALUR, qui vise à favoriser l’accès au logement, d’avoir changé la donne et augmenté le champ des possibles. Puisque l’habitat mobile à usage permanent peut désormais se développer, les Plans Locaux d’Urbanisme (PLU) autorisent d’installer une maison transportable partout, à condition que ce soit en zone urbaine (Zone U).

Un village au cœur d’un quartier

« Ces évolutions réglementaires nous ont permis de lancer un projet inédit dans une grande ville d’Auvergne-Rhône-Alpes, s’enthousiasme François Ferry. C’est un village installé sur 7 000 m² de terrain temporairement abandonné, que nous louons pour plusieurs années. Nous avons le projet de transformer cette friche en zone redynamisée, de construire des unités de vie sur un cinquième de la superficie et d’utiliser le reste pour des jardins, un tiers-lieu, une conciergerie, une crèche et bien d’autres parties communes. Tout est en hors-sol et réversible. » Le projet est soutenu, entre autres, par un Établissement Public Foncier à travers un Organisme Foncier Solidaire (OFS), ces entités sans but lucratif, créées par la loi ALUR qui ont pour mission d’acquérir et gérer des terrains, pour y réaliser des logements ou des locaux à usage mixte professionnel et d’habitation à prix abordables. Seuls les « droits réels sur les murs » seront ensuite loués ou vendus. « Ce projet apporte clairement la preuve que l’on peut dissocier le terrain du bâti, conclut François Ferry. Les maisons en bois de ce projet ont un impact environnemental très faible. Fabriquées en France dans une usine dans la Meuse, qui utilise la technologie BIM, elles disposent de tout le confort nécessaire au bien-être des habitants, et sont connectées, avec des équipements pilotables par smartphone. Je suis convaincu que ces types de projets se multiplieront dans l’avenir. Merci à la SBA d’accompagner ce déploiement, pour apporter le meilleur du Smart Home aux bâtiments et à la ville de demain. »

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